14e Dimanche T. O. , Marc 6, 1-6

Il est de chez nous

Tous reconnaissaient la sagesse de Jésus à la manière dont il parlait des choses de Dieu. Tous constataient les guérisons qu’il accomplissait, spécialement à Capharnaüm. Mais à Nazareth même les gens restaient en retrait. Ils se posaient la vraie question : « D’où cela lui vient-il ? » ; mais il butaient sur une évidence :« Il est de chez nous ! Nous connaissons sa mère, son atelier, ces cousins et ses cousines ! ». Et Jésus s’étonnait de leur manque de foi, de les voir s’accrocher à leurs habitudes mentales, à la routine des relations, sans ouvrir leur cœur à ce que lui, Jésus, leur donnait à voir et entendre.

Nous connaissons bien par expérience, nous aussi, ce conflit intérieur entre la visée de foi et la vie quotidienne, entre notre désir de Dieu et la pesanteur des habitudes, entre la liberté que Jésus nous apporte et l’accaparement des choses à faire, à dire, à penser.

Et cette tension, nous la vivons parfois avec étonnement, avec mauvaise conscience, parfois, souvent même, avec peine. C’est pourtant la loi même de notre passage sur la terre, de notre voyage pascal : c’est au cœur de nos tâches que nous avons à louer et servir Dieu, c’est dans notre planning journalier qu’il nous faut garder du temps pour lui ; notre amour du Christ sera toujours habité par tous ceux qu’il nous donne à aimer, et notre Eucharistie lestée chaque jour des soucis de notre témoignage.

De même que Jésus venait de Dieu, mais qu’il était bien de Nazareth, c’est bien dans notre Nazareth, et pas ailleurs, que nous avons à vivre l’appel de Dieu, l’envoi par Dieu et notre conformité avec le Christ. De même que les gens de Nazareth avaient à reconnaître l’Envoyé de Dieu, bien qu’il vécût depuis trente ans au milieu d’eux, c’est dans notre vie concrète que nous avons à rejoindre le Christ en acte de salut et de réconciliation.

C’est pourquoi il est si important de nous réconcilier avec le quotidien, avec l’ordinaire que Dieu aime. Chaque jour le moment de l’Eucharistie nous est donné justement pour coïncider avec le projet de Dieu et pour laisser Jésus réveiller notre enthousiasme, et notre certitude que nous pouvons l’aimer là où nous sommes, tels que nous sommes, avec nos forces ou avec des misères du corps et du cœur .

Jésus n’attend que notre foi pour faire en nous, non pas des merveilles, mais, comme pour Marie, simplement, divinement, « de grandes choses ».

De grandes choses que peut être il sera seul à voir, mais qui rejoindront, dans l’humilité de notre cœur, l’immense dessein de Dieu pour le salut du monde.

De grandes choses qui nous rendront plus pauvres encore à nos propres yeux, mais heureux de faire tant de riches, par notre imploration, par l’offrande de nos joies, par notre courage à repousser les tristesses.

De grandes choses qui n’auront pas de nom sur la terre, mais que Jésus déposera déjà, invisiblement, dans nos mains vides, comme un acompte sur la joie du ciel.

« Relevez vos mains qui faiblissent et vos genoux qui fléchissent ; faites-vous des sentiers droits pour y marcher » : c’est l’appel que nous faisait entendre à l’instant l’épître aux Hébreux, un appel assorti de trois petites consignes qui peuvent orienter notre examen de conscience :

  • Recherchez la paix avec tous.
  • Que personne ne se dérobe à la grâce de Dieu.
  • Qu’aucune racine amère ne pousse dans les cœurs.

C’est ainsi que notre soumission filiale au Père des esprits portera dès maintenant, dans notre Nazareth, un fruit de paix.

Dès aujourd’hui, « rien que pour aujourd’hui », accueillons ce don de Dieu dans le silence, ce beau silence, qui sera jusqu’au bout le climat de notre foi et de notre espérance.

Fr. Jean-Christian Lévêque, o.c.d.

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