1er Dimanche de l’Avent Lc 21, 25-36

Un germe de justice

Avec ce nouvel Avent, voici revenu le temps de laisser à Dieu toute l’initiative dans l’Église, dans le monde, dans notre communauté et dans chacune de nos vies.

Jérémie, à l’instant, nous parlait de cette initiative gratuite de Dieu en termes de promesse et d’ac-complissement : « Voici venir des jours où j’accomplirai la bonne parole que j’ai prononcée sur la maison d’Israël et sur celle de Juda ». Israël, à l’époque du prophète, c’est la zone occupée par les Assyriens ; Juda, c’est le pays encore libre.

Et quel est le moyen que Dieu a choisi pour se réconcilier les deux peuples frères ? « Je ferai germer un germe de justice ». Qui dit germe dit espérance et promesse de vie. Ainsi Dieu accomplira sa parole en donnant à ses fils de quoi espérer. Toute l’attente, toute la confiance du peuple de Dieu, va pouvoir se concentrer et se fixer sur ce Germe suscité par Dieu, un roi fils de David, de qui germera tout renouveau pour le monde et chacun des croyants.

Et tout le programme de ce Fils de David consistera à promouvoir la justice, c’est-à-dire la justice entre les hommes, certes, mais surtout la juste relation à Dieu. Nous rencontrons souvent, dans les textes de l’Ancien et du Nouveau Testament, cette notion de justice, typiquement biblique, qui ne nous est pas familière.

Dieu est juste envers son peuple parce qu’Il correspond toujours à ce que son peuple est en droit d’attendre de Lui ; Dieu se montre juste parce qu’Il reste constant dans son propos d’Alliance. De même l’homme devient peu à peu un juste devant Dieu quand il correspond à ce que Dieu est en droit d’attendre de lui : le croyant est juste quand il joue loyalement le jeu de l’Alliance.

Être juste, c’est donc s’a-juster à Dieu, au plan de Dieu, et à son amour. Et c’est cette justice-là, avant tout, que Dieu, par son envoyé, entreprend de faire germer de nouveau. C’est cet ajustement au projet de Dieu, cette union de volonté avec Dieu, qui apportera à Juda et à Jérusalem - et donc maintenant à l’Église de Jésus - à la fois le salut et la sécurité, à la fois l’harmonie avec Dieu et la certitude que rien ne pourra nous arracher de sa main.

Et les fidèles du Seigneur entreront avec tant d’ardeur dans son programme de renouveau que ce programme lui-même deviendra le nom de la ville sainte : on l’appellera désormais, en ces jours-là, qui seront les jours du Messie, « Adonay çidqénu », « le Seigneur notre justice ». De même la nouveauté spirituelle que Dieu, librement, nous apporte en ce temps de l’Avent, la « justice », la nouvelle amitié qu’il nous offre dans le Christ, est un germe de vie si puissant qu’il remodèle notre être en profondeur (devient notre « nom nouveau »), et que tout, en nous, devient consonant au projet de Dieu qui veut réussir le monde pour sa gloire et pour notre bonheur.

Voilà la « sainteté sans reproche », la consécration sans reprise, dans laquelle saint Paul veut nous voir établis devant Dieu (1 Th 3,12 - 4,2). « Vous avez appris, écrit-il, comment il faut vous conduire pour plaire à Dieu » ; autrement dit : « Vous connaissez la route de la justice, vous savez comment vivre la juste relation à Dieu. »

Une seule attitude nous est demandée, en cet Avent où nous vivons plus intensément l’attente du salut au nom de tous les hommes : laisser en nous germer le Christ, le Christ tel que Dieu nous le donne, le Christ humble et fraternel, qui ouvre les mains sans jamais les refermer, le Christ dont toutes les paroles sont porteuses de paix et d’espérance.

Peu importent dès lors nos limites et nos misères, peu importe la fragilité de ce petit germe qu’est notre communauté, peu importe l’insécurité que nous partageons avec toute l’Église contemporaine : « Celui » qui germe en nous et dans notre groupe de croyants est plus vivant et plus fort que toutes les énergies qui désintègrent le monde et le cœur des hommes.

Oui, « redressons-nous et relevons la tête », selon la consigne de Jésus. Notre rédemption approche, elle est là, en Jésus Christ, puisqu’il est Dieu avec nous, Dieu notre justice. Nous n’avons plus qu’à saisir le salut que Dieu fait advenir, et Jésus aujourd’hui ne nous demande qu’une chose : « Restez éveillés ! »

Fr. Jean-Christian Lévêque, o.c.d.

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