27e Dimanche T.O., Mt 21, 33-43

La parabole des vignerons homicides

Visiblement, Jésus a voulu faire de sa parabole un résumé de l’histoire de l’Alliance. À sa vigne de choix, le pays d’Israël, Dieu a envoyé à maintes reprises des prophètes, qui ont été mal reçus et maltraités. Puis, dans les derniers jours, par une sorte de folie de confiance, il a envoyé son propre Fils, le véritable héri­tier des promesses faites à Abraham ; et Jésus annonce d’avance le destin qui sera le sien : lui aussi sera jeté hors de la vigne, hors de la ville, et ses adversaires le tueront.

Les chefs des prêtres et les Pharisiens ont décodé immédiatement la parabole, et ont fort bien compris que Jé­sus les visait. De fait ils portent une lourde responsabilité dans le supplice et la mort de Jésus. Mais une des phrases de Jésus nous concerne tous, en cette période d’épreuves pour son Église. C’est une ci­tation du psaume 118 : « La pierre rejetée des bâtisseurs est devenue la tête de l’angle ».

Beaucoup des bâtisseurs de notre monde écartent, délibérément ou par ignorance, la pierre qu’est Jésus­ Christ. On ne veut pas des valeurs qu’il apporte, on refuse les perspectives qu’il ouvre, on se révolte contre les exigences qu’il rappelle concernant les droits de Dieu et des devoirs de l’homme.

Même si on ne peut plus, scientifiquement, nier la réalité de Jésus de Nazareth, ni les traces de son œuvre sur toute la terre, on laisse de côté son message comme une pierre inutile et malcommode. Tous les moyens sont bons pour affaiblir son influence : ou bien on aligne Jésus, sans plus, sur tous les fondateurs de religions ; ou bien on fait taire ses témoins en les privant de ressources ou de liberté ; ou bien encore on disqualifie son Église par des campagnes de calomnie.

II arrive même, de nos jours, que des tentatives de dénigrement émanent de fils ou de filles de l’Église. Par rnaladresse, par inconscience, mais parfois aussi par un étrange ressentiment, ils participent à la marginalisation, puis au rejet, de Jésus Sauveur du monde. Mais le dernier mot appartient toujours à Dieu, qui obstinément veut réussir l’homme.

Aujourd’hui encore, en dépit des entreprises de déstabilisation de la foi, Jésus-Christ, rejeté des bâtisseurs, demeure la pierre angulaire et l’avenir du monde. Et cela, « c’est l’œuvre du Seigneur Dieu », surprenante, imprévisible, indiscutable, « une merveille sous nos yeux ». Mais les yeux qui voient cette merveille sont « les yeux illuminés du cœur » (E 1,18) c’est-à-dire des yeux qui veil­lent dans la foi, des yeux agrandis par l’espérance.

Le Seigneur n’exempte pas les croyants du labeur de bâtir le monde, mais il vient au devant de leur détresse lorsqu’ils se sentent à leur tour écartés, négligés, rejetés, iI manifeste sa présence, il révèle de loin en loin des signes de sa puissance. Par son Esprit toujours à l’œuvre, il donne et redonne le royaume à son peuple qui veut en porter les fruits.

De cela nous sommes les témoins, au cœur de l’Église et au cœur du monde. Là où le monde ne veut voir que ruines ou chantier déjà à l’abandon, nous apercevons, dans la lumière de la pa­role de Dieu, toujours humblement et en espérance, le Christ, pierre d’angle, plus belle et solide que jamais. Et le courage nous revient pour entrer nous-mêmes, comme pierres vivantes, dans la construction de la mai­son de Dieu.

Fr. Jean Christian Lévêque, o.c.d.

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