7e Dimanche de Pâques -C-

« Viens, Seigneur Jésus ! »

Toutes nos prières expriment plus ou moins intensément ce que nous portons dans nos cœurs, dans nos esprits, nos craintes et nos joies, notre Foi et notre Espérance. D’autant plus celles que nous adressons alors qu’arrive l’heure cruciale de la mort. Telles sont les prières d’Étienne et de Jésus que nous venons d’entendre, et d’une autre manière, celle de Jean dans l’Apocalypse dans l’attente du grand passage de ce monde vers le Royaume. Dans ces moments, la prière exprime encore mieux la réalité de notre être et le fond de notre cœur.

Étienne, premier martyr de l’Église, a suivi Jésus dans l’offrande de sa vie et illustre la véritable réussite chrétienne, malgré l’échec apparent de la mort. En effet, s’il s’endort dans la mort sans avoir pu convaincre ses contradicteurs, mais il est mené par l’Esprit Saint au sommet de la connaissance de Dieu et de la charité. Le livre des actes des apôtres nous dit que rempli de l’Esprit Saint, Étienne vit la gloire de Dieu et Jésus debout à la droite du Père. Puis, toujours mû par l’Esprit Saint, comme Jésus sur la croix, il pose un acte de confiance et d’amour : « Seigneur Jésus, reçois mon esprit » puis « Seigneur, ne leur compte pas ce péché ».

Cette prière d’Étienne, avec sa vision de la glorification de Jésus auprès du Père, est le premier témoignage de la foi au Christ, vrai Dieu et vrai homme. Jésus, que les apôtres ont vu monter au ciel au jour de l’Ascension, a bien été élevé au-dessus des anges, et il participe désormais comme Fils unique à la gloire éternelle de son Père. C’est bien ce que Jésus avait demandé à son Père pour ses disciples dans sa grande prière sacerdotale dont nous avons entendu un extrait : « Père, ceux que tu m’as donnés, je veux que là où je suis, eux aussi soient avec moi, et qu’ils contemplent ma gloire, celle que tu m’as donnée parce que tu m’as aimé avant même la création du monde ».

L’accomplissement des promesses du Christ ne se réalise pas seulement dans notre capacité à contempler les réalités divines. Dans la foi, l’amour de Dieu est inséparable de la charité fraternelle. Là encore, le martyre d’Étienne nous montre l’exhaussement de la prière de Jésus pour ses disciples : « Je leur ai fait connaître ton nom, et je le ferai connaître encore, pour qu’ils aient en eux l’amour dont tu m’as aimé ». C’est cet amour de Jésus, l’Esprit Saint répandu en nos cœurs, qui pousse Étienne à pardonner à ses bourreaux. D’ailleurs, comment pourrait-il leur en vouloir ? Loin de lui ôter quoi que ce soit, la mort lui donne ce qu’il espère. Il rejoint enfin ce qu’il a pu contempler, la mort lui donne plus qu’elle ne lui enlève puisqu’il pourra participer la même gloire que Jésus partage avec son Père.

C’est dans cette Foi et dans cette Espérance que Jean dans l’Apocalypse pousse son cri : « viens ! ». L’apôtre appelle la venue du Seigneur, car il sait lui aussi qu’il a plus à gagner qu’à perdre dans cette venue. Le terme Apocalypse est devenu aujourd’hui dans le langage courant synonyme de catastrophe, alors qu’étymologiquement et pour la foi chrétienne, elle est une révélation du dessein de Dieu qui réalisera son projet d’amour pour l’humanité et la création. L’Apocalypse n’est pas à l’anéantissement de l’humanité, mais la transformation du monde selon le dessein du Père. Il ne s’agit pas de détruire l’humanité, mais d’en extirper le mal pour qu’advienne le Royaume de justice, de paix et de fraternité. L’Apocalypse ne révèle pas des malheurs et des catastrophes à venir, mais elle pose un regard de foi sur le mal qui ronge actuellement notre monde en appelant la réalisation du Royaume de Dieu. C’est pourquoi Jean ne peut plus vivre séparé de celui qui peut apporter la véritable paix, la véritable justice et la véritable fraternité, il crie donc de toute sa foi : « viens, Seigneur Jésus ! ».

Et c’est bien cette communion que Jésus désire avec tous ceux qui croiront en lui : « Que tous, ils soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et moi en toi. Qu’ils soient un en nous, eux aussi, pour que le monde croie que tu m’as envoyé ». Cette prière de Jésus n’est pas une demande pour que le disciple s’évade du monde, mais que la terre et le ciel se rencontrent enfin. Comme l’humanité en la personne de Jésus a été accueillie au sein de l’amour trinitaire dans le mystère de la Résurrection et de l’Ascension, le ciel rejoint chaque jour de la terre puisque le cœur de l’homme est la demeure de Dieu. « Et moi, je leur ai donné la gloire que tu m’as donnée, pour qu’ils soient un comme nous sommes un : moi en eux, et toi en moi ». La joie profonde vient de cette communion déjà réalisée mais non encore achevée.

La prière d’Étienne avait été l’écho de la prière de Jésus, prière que nous pouvons faire nôtre au moment où la vie humaine est sur le point d’atteindre son terme et sa plénitude sur terre. La prière de l’Église dans l’Apocalypse est le chant de cette même prière de Jésus qui désire la pleine réalisation de la communion. Au terme de ce temps pascal, que le chant de l’Esprit Saint monte en nos cœurs pour que se réalisent les promesses du Seigneur : oui, viens Seigneur Jésus !

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