Homélie 14° dim. TO : pas de vacances pour la mission !

donnée au couvent de Paris

Textes liturgiques (année C) : Is 66,10-14 ; Ps 65 ; Ga 6, 14-18 ; Lc 10, 1-12

Aujourd’hui, c’est le premier dimanche de juillet, au début du temps des grandes vacances, comme on disait dans mon enfance. L’évangile de ce jour serait peut-être mieux adapté au temps de la rentrée, puisqu’il s’agit d’aller travailler à faire connaître l’Évangile du Seigneur ! On peut répondre que le temps de l’évangélisation ne connaît pas de rupture, que cette œuvre se poursuit sans cesse, par des ouvriers qui se relayent évidemment et, pour cela, il est nécessaire qu’ils soient nombreux !

« En ce temps-là, parmi les disciples, le Seigneur en désigna encore 72 » Jésus désigne pour une mission, c’est lui qui appelle, et cette désignation n’est pas un titre, un diplôme, une dignité dont on pourrait tirer orgueil, c’est un service qui est demandé. Il « désigna encore », le « encore » se justifie avec le chapitre précédent de notre Évangile dans lequel Jésus envoie en mission les 12. Ici, le nombre est 72. Pourquoi ce nombre ? C’est celui de la descendance des fils de Noé qui est donnée au chapitre 10 de la Genèse, le peuplement de la Terre après le Déluge. Dans le judaïsme, ce nombre représentait l’ensemble des nations. Ainsi, ce choix des 72 annonce-t-il un plan d’évangélisation universelle. On sait que celle-ci ne commencera vraiment qu’après la Pentecôte. Les missionnaires sont envoyés deux par deux car la mission n’est pas une affaire individuelle, mais communautaire, ecclésiale, deux étant le minimum pour cela. Jésus les envoie en avant de lui, comme des messagers, pour que les missionnaires le représentent, le rendent présent.

Le cahier des charges des missionnaires commence par un constat sur la disproportion entre le travail à faire, la moisson, et le nombre d’ouvriers disponibles ! La moisson est une image traditionnelle du jugement de Dieu chez les prophètes de l’Ancien Testament, ici, il s’agit pas de cela mais du champ de la Mission. Il est intéressant de noter que le manque d’ouvriers, de missionnaires, est posé dès le départ de la Mission chrétienne ! Il faut le prendre non pas comme un constat paralysant ou décourageant mais comme une dure réalité, un défi à relever ! D’où peut-être l’emploi de l’impératif… Un premier impératif : « Priez ». Puisqu’il manque des ouvriers, et bien demandez au « maître de la moisson d’envoyer des ouvriers pour sa moisson ». Logique de Dieu, pour qui l’homme, le sommet de sa création, est un partenaire, un être libre à qui Il demande sa collaboration. Dieu nous prie de le prier ! Dieu n’enverra pas de nouveaux ouvriers si nous n’en faisons pas la demande, une demande sérieuse parce qu’elle doit nous engager en vérité !

Suit un deuxième impératif : « Allez ». Ce verbe est en lui-même tout un programme, mais il faut l’entendre surtout comme un encouragement, une exhortation à ne pas fléchir devant les difficultés inévitables de la Mission. Jésus ne brosse pas un tableau idyllique de la Mission, au contraire, aller comme « des agneaux au milieu des loups » pourrait en faire reculer plus d’un ! Suit une série d’impératifs, donnant des consignes concrètes sur la manière de faire. Si ces consignes pratiques ne sont plus strictement d’époque, retenons simplement que Jésus a le souci de bien former ses missionnaires ! A nous d’actualiser ces consignes… Peut-être ne vous sentez-vous pas concernés directement par tout cela ? Réfléchissez, cependant, à ce que dit Jésus à propos du don de la paix. Si vous êtes porteurs de la paix de Dieu, si vous l’avez reçue, il vous est alors possible de la donner à votre tour, dans n’importe quelle situation. La Mission commence là ! À ce niveau, ce n’est pas affaire de spécialistes !

Les « 72 disciples revinrent tout joyeux. » Voyez comme Jésus répond à la joie spontanée de ses disciples, à leur émerveillement devant le succès face à l’Ennemi. Jésus, sans les contredire, remet les choses à leur juste place. La véritable joie du missionnaire n’est pas dans le succès apparent, qui pourrait monter à la tête et conduire à l’autosatisfaction illusoire ! La Mission peut connaître des échecs, il faut savoir les traverser et ne pas oublier que si l’Ennemi a été vaincu sur la croix, il est encore actif ! La guerre est gagnée, mais paradoxalement la bataille continue… Que dit Jésus ? « … réjouissez-vous parce que vos noms sont inscrits dans les cieux ». La joie ! Il faudrait relire le texte d’Isaïe, la première lecture, qui nous donne une description de cette joie « Réjouissez-vous avec Jérusalem ! Exultez en elle, vous tous qui l’aimez !… » Se réjouir ? Pourquoi ? Parce que nous sommes parmi les élus de Dieu, admis en sa Présence. Oui, frères et sœurs, que notre joie véritable soit dans la certitude d’être aimés de Dieu. Cet amour, Dieu l’a manifesté sur la Croix, croix dont Paul dit qu’elle reste sa seule fierté, qu’elle donne paix et miséricorde, cet amour est le fondement de notre salut ! C’est cela que nous avons à partager, à faire connaître autour de nous. Cette mission, nous l’avons reçue, nous avons à la continuer, à la transmettre, sans nous décourager, avec le secours de sa grâce. Amen

fr. Robert Arcas, ocd (Couvent de Paris)
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