Homélie 4° dim. TO : le véritable amour, c’est …

donnée au couvent de Paris

Textes liturgiques (année C) : Jr 1,4-5.17-19 ; Ps 70 ; 1 Co 12,31 - 13,13 ; Lc 4,21-30

L’amour, voilà un mot, et pas seulement un mot, qui intéresse tout le monde ! L’amour met en mouvement les êtres humains, comme Jésus à la fin de notre Evangile, Mais lui, passant au milieu d’eux, allait son chemin, car les hommes sont tous concernés par cette réalité qui transforme la vie, lui donne un sens, permet de traverser bien des passages difficiles. L’amour est vital, c’est une banalité de le dire, il n’est pas possible de vivre sans amour, sans aimé et être aimé. Mais que veut dire aimer ? Quand je dis que j’aime, ou que je suis aimé, comment le vérifier ? Comment s’assurer que je ne suis pas dans l’illusion ? Notre deuxième lecture, 1 Co 13, et l’Évangile du jour donnent des réponses à ces questions. Paul donne une définition de l’amour qu’il est bon de lire, et de relire. Ce texte a le mérite de définir le réel de l’amour, de l’amour selon Dieu : « L’amour prend patience ; l’amour rend service ; l’amour ne jalouse pas ; il ne se vante pas, ne se gonfle pas d’orgueil ; il ne fait rien d’inconvenant ; il ne cherche pas son intérêt ; il ne s’emporte pas ; il n’entretient pas de rancune ; il ne se réjouit pas de ce qui est injuste, mais il trouve sa joie dans ce qui est vrai ; il supporte tout, il fait confiance en tout, il espère tout, il endure tout. L’amour ne passera jamais. »

En écoutant cette définition de l’amour, comment ne pas penser aussitôt que cet amour-là me fait défaut ? Que je n’y suis pas ! Comment ne pas reconnaître que cet amour, défini ainsi par Paul, ne vient pas de nous, n’est pas naturellement en moi ! Nous n’avons pas à nous culpabiliser quand nous faisons la découverte de notre manque d’amour, ce défaut marque tout être humain. Dieu seul connaît l’amour, Lui seul possède l’amour puisqu’Il est l’Amour (1 Jn 4,8). Il est la source de l’Amour et Lui seul peut donner de cet amour. Le propre de l’amour, du vrai amour, est de se donner. Dieu donne l’amour à toutes ses créatures, particulièrement aux humains.

Paul n’écrit pas ces lignes pour nous accabler, nous accuser, ou nous rendre jaloux. Non, il écrit ces lignes admirables pour notre salut. Pour dire que ce qui relève de nous est d’accueillir cet amour, de l’inviter à venir en nous et bien évidemment de le donner aux autres, à ceux qui nous entourent, notre prochain. Dieu donne l’amour par des médiations : sa Parole, les sacrements, nos frères, ses enfants. L’amour de Dieu ne vient pas de moi, mais il peut m’habiter, passer par moi quand je le reçois et que je le transmets à mon tour. Et cet amour peut me conduire loin…

L’Évangile du jour complète la définition de 1 Co 13, il va jusqu’à annoncer implicitement l’extrême de l’amour, la Passion du Christ ! Le dicton : « médecin, guéris-toi toi-même » annonce les interpellations, voire les injures qui seront faites au Crucifié ; et la fin de notre Évangile, quand Jésus est conduit jusqu’à un escarpement de la colline pour être précipité en bas, apparaît comme une annonce de la mise à mort de l’envoyé de Dieu. La fureur des personnes qui cherchent à l’assassiner témoigne d’un manque d’amour, de la jalousie, des amours propres blessés. Il est vrai que Jésus ne leur parle pas en diplomate ! Les membres de la synagogue de Nazareth n’ont pas supporté que Jésus leur rappelle que le Dieu d’Israël est aussi le Dieu des païens ! "Au temps du prophète Élie, lorsque pendant trois ans et demi le ciel retint la pluie, et qu’une grande famine se produisit sur toute la terre, il y avait beaucoup de veuves en Israël ; pourtant Élie ne fut envoyé vers aucune d’entre elles, mais bien dans la ville de Sarepta, au pays de Sidon, chez une veuve étrangère. Au temps du prophète Élisée, il y avait beaucoup de lépreux en Israël ; et aucun n’a été purifié, mais bien Naaman, le Syrien." Le Dieu d’Israël n’est pas seulement le Dieu des juifs. Le Dieu de Jésus Christ, qui est Dieu des juifs, n’est pas seulement le Dieu des chrétiens ! L’amour dont parle Paul s’adresse au genre humain, il est universel.

Cet amour ne passera jamais. La foi chrétienne, l’espérance chrétienne passeront. L’Amour, qui est Dieu, est éternel. Nous y croyons et nous pouvons déjà y goûter ; nous pouvons déjà en vivre, sachant que vivre cet amour en vérité, jusqu’au bout, peut conduire à la Croix ! Réécoutons l’oracle du Seigneur adressé au prophète Jérémie, dans la 1e lecture : "Ils te combattront, mais ils ne pourront rien contre toi, car je suis avec toi pour te délivrer" Délivrer de la peur, délivrer de la haine, délivrer de la mort. Délivrer de tout ce qui empêche l’amour de se déployer librement. Parole de Dieu à recevoir dans la foi, parole qui donne l’espérance, parole d’amour qui nous donne, comme Jésus, de passer au milieu des obstacles, d’aller sur le chemin de la vie. Amen

fr. Robert de l’Incarnation, ocd (Prieur du Couvent de Paris)
Revenir en haut