Homélie pour Ste Thérèse d’Avila - 15 octobre 2014

donnée au couvent de Paris

Textes liturgiques : Sg 7,7-14 ; Rm 8,14-17.26-27 ; Jn 4,5-15

"Seigneur, donne-la-moi, cette eau". Telle est la prière de la Samaritaine, telle était celle de Thérèse dont nous allons fêter le 500e anniversaire de la naissance, très exactement le 28 mars prochain, en fait tout au long de cette année du 15 octobre de cette année au 15 octobre de l’année prochaine. Cette prière est fondamentale dans la vie de tout être humain qui a rencontré un jour Jésus Christ, que ce soit au bord d’un puits ou ailleurs, il y a autant d’ailleurs que de vies singulières… Que cherchons-nous dans cette prière sinon une réponse de Dieu, de ce Dieu qui se révèle en Jésus Christ ? On sait que Thérèse d’Avila a passé une vingtaine d’années, étant alors religieuse à l’Incarnation, avant d’entendre une réponse, un début de réponse, qui allait bouleverser sa vie et la conduire à fonder un nouveau Carmel, celui auquel nous appartenons, Frères Carmes, Moniales Carmélites et Séculiers Les trois branches de l’Ordre des Carmes Déchaux et l’ensemble de la Famille du Carmel se préparent depuis cinq ans déjà à célébrer solennellement le 5e centenaire de la naissance de la Madre Nous y sommes, c’est aujourd’hui que commence cette année jubilaire ! Quel sens allons-nous lui donner ?

Toile ste therese d avila

Ce « faire-mémoire » de la Sainte Mère est, tant pour les membres de la Famille du Carmel, une occasion, une chance de renouveler l’engagement, la vie de foi, de faire une expérience de commencement, de recommencement, dans la vie spirituelle, la vie avec Dieu et avec le prochain, un réveil spirituel ! Seigneur, donne-la-moi, cette eau Cette simple prière est comme le résumé de ce bel Évangile. On y trouve la rencontre intime, intense, décisive pour une vie, entre deux personnes qui ont soif de vivre, d’aimer, d’être pleinement eux-mêmes, dans la vérité avec l’autre. Cette rencontre improbable entre un Rabbi juif et une Samaritaine dit quelque chose de notre Dieu qui, à la fois, se révèle et se cache, notre Dieu qui reste un doux et beau Mystère A ses Carmélites, la Madre écrit dans les Demeures (1D 2,17) : « Comprenons, mes filles, que la véritable perfection est dans l’amour de Dieu et du prochain ; plus nous observerons ces deux commandements, plus parfaites nous serons. Toute notre règle et nos Constitutions ne tendent à rien d’autre, elles ne font que nous donner le moyen de mieux les observer. »

Thérèse était une femme de rencontres, de relations humaines fortes, vraies et fécondes Elle aimait enseigner à ses filles et aimait être enseignée par le Seigneur et ses envoyés. Elle aimait particulièrement la sagesse. Dans la première lecture, il est possible de lire le texte en substituant Jésus au mot Sagesse. Le plus grand trésor que nous ayons est bien ce Jésus-Sagesse qui promet l’eau vive à la Samaritaine et à tous ceux et celles qui entrent et persévèrent dans un même chemin de rencontre, une rencontre qui transforme. L’eau est un symbole de la vie, elle a une source, une origine, elle coule en s’adaptant au terrain qu’elle rencontre et qu’elle irrigue et féconde, on ne la retient pas longtemps, cette eau enfin aboutit dans cet autre monde qu’est l’océan

Cette eau vive que Jésus propose à la Samaritaine ne renvoie-t-elle pas à l’Esprit Saint dont parle l’apôtre Paul, dans la deuxième lecture ? Tous ceux qui se laissent conduire par l’Esprit de Dieu, ceux-là sont fils de Dieu. L’Esprit Saint fait de nous des fils et des filles du Père, des enfants de Dieu, dont la vocation est de parler à Dieu, de converser avec Lui, dans la prière, et d’œuvrer par suite logique, comme une eau qui coule de source, d’œuvrer dans ce monde pour sa Gloire et le Salut des hommes Sur ces œuvres, ce qu’elles supposent d’engagement, Thérèse n’est pas muette, au contraire ! Le livre des Demeures en témoigne Voici ce qu’elle écrit dans les 7D 4,9 : « Je le répète, il ne suffit pas que vous preniez pour base la prière et la contemplation. Si vous ne travaillez à acquérir les vertus, si vous ne vous exercer à les pratiquer, vous demeurerez toujours des naines dans la vie spirituelle. Et encore, Dieu veuille que vous vous borniez à ne pas grandir ! Car, vous le savez, ne pas croître, c’est décroître. Et, en effet, quand l’amour est véritable, je regarde comme impossible qu’il se contente de demeurer stationnaire.  » Seigneur, donne-la-moi, cette eau. L’eau vive que Dieu nous propose, c’est Lui-même, Il habite en nous, et nous avons à le chercher, à le trouver, à demeurer avec Lui Ainsi nous recevons la force pour vivre et agir dans le monde, selon la mesure qui nous est donnée. Certes, les difficultés ne nous sont pas épargnées, mais il faut ne pas perdre la foi dès les premiers pas. A propos des difficultés que nous rencontrons dans la vie de tous les jours, je voudrais vous citer un passage du rapport sur l’état de l’Ordre que notre Père général a fait lors du dernier Définitoire extraordinaire en Corée (26 août-3 septembre) : "Une parole de Thérèse, encore une fois, m’est venue en aide : le chemin qui mène vers le Seigneur “est une route royale, ça n’est pas un sentier” (V 35,13). C’est le sentier où nous marchons seuls qui est étroit et dangereux, et la moindre inattention suffit à nous précipiter dans l’abîme. Au contraire, celui qui a mis sa confiance dans le Seigneur “est en sécurité sur une route large et royale ; le précipice est loin ; à peine a-t-il bronché un tantinet que Vous lui tendez, Vous, Seigneur, la main. S’il vous aime et n’aime pas les choses du monde, (…) il marche dans la vallée de l’humilité” (V 35,14)."

Alors, courage, en nous unissant par le désir avec Dieu, nous œuvrerons dans l’amour et nous marcherons à la suite du Christ, humblement, avec nos pauvres moyens, détachés de tout lien qui nous empêchent d’avancer, tendant à nous unir à Lui, avec Thérèse et beaucoup d’autres de ses amis… Amen

P. Robert Arcas ocd

Interview du P. Robert sur Radio Notre-Dame le 15 octobre 2014 : http://www.carmes-paris.org/messe19octobre-stj500/

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