« Il met à nu le cœur profond » (Ho 17° dim. TO) - 26/07/20

donnée au couvent d’Avon

Très jeune souverain, Salomon, fils et successeur de David, a offert à Dieu un sacrifice solennel : « A Gabaon, qui était alors le lieu sacré le plus important, il immola sur l’autel un millier de bêtes en holocauste », dit le livre des Rois [1]. Pendant la nuit, le Seigneur lui apparait en songe et promet de lui donner ce qu’il aura demandé dans la prière. Quand Dieu nous parle, il met à nu le cœur profond. Notre récit nous fait voir le cœur profond, la grandeur d’âme de Salomon : il ne demande pas une longue vie, ni richesses, ni l’élimination de ses ennemis ; il dit au contraire au Seigneur : « Donne à ton serviteur un cœur attentif pour qu’il ache gouverner ton peuple et discerner le bien et le mal. » [2] Le Seigneur l’a exaucé, si bien que Salomon reste célèbre dans le monde entier pour sa sagesse et ses jugements droits : la sagesse de Salomon est devenue proverbiale.

Il a donc prié Dieu de lui donner « un cœur attentif », littéralement un cœur qui écoute. Que signifie cette expression ? Nous savons que le « cœur » dans la Bible n’indique pas seulement une partie du corps mais le centre de la personne, le siège de ses intentions et de ses jugements. Nous pourrions dire : la conscience. Un « cœur attentif » signifie donc une conscience qui sait écouter, qui est sensible à la voix de la vérité, donc un cœur capable de discerner le bien et le mal. Dans le cas de Salomon, la demande est motivée par la responsabilité de guider une nation, Israël, le peuple que Dieu a choisi pour manifester au monde son dessein de salut. Par conséquent, le roi d’Israël doit chercher à être toujours en harmonie avec Dieu, à l’écoute de sa Parole, pour guider le peuple sur les chemins de la justice et de la paix. L’exemple de Salomon vaut pour tout homme. Chacun de nous a une conscience pour être en quelque sorte « roi », pour exercer la grande dignité humaine d’agir selon une conscience droite en œuvrant pour le bien et en évitant le mal. La conscience morale présuppose la capacité d’écouter la voix de la vérité, d’être dociles à ses indications.

«  Un cœur qui écoute » : que va entendre un cœur qui écoute ? Nous avons répondu : la voix de la conscience. Saint Paul quant à lui répond : le cœur attentif entend l’appel de Dieu. Nous lisons qu’au commencement était le Verbe, la Parole de Dieu. Peut-être devrions-nous traduire ces mots par : au commencement était l’appel de Dieu. L’appel, c’est le projet de Dieu que la lettre aux Romains explique longuement : Dieu nous aime d’avance, il nous appelle, il nous ajuste à son Alliance dans le Christ Jésus, il nous donne sa gloire.

Qu’en est-il pour nous ? L’Esprit saint veut réveiller en nous l’appel premier, notre vocation de chrétien, ce que Dieu nous appelle à être en sa présence. Il y a donc un synonyme du mot « chrétien » : c’est le mot : « appelé ». Au lieu de dire : Je suis chrétien, je peux dire : je suis appelé. En latin on dit : vocatus. Notre frère Benoît-Antoine, ayant reconnu sa vocation en vivant parmi nous depuis deux ans, a fait profession religieuse lundi dernier. Nos prières l’accompagnent ainsi que nos jeunes frères en formation, Pierre-Henri qui poursuit le noviciat, où entreront mardi nos trois frères Eric, Maxime et Nicolas, tandis que Xavier sera rejoint bientôt au postulat par deux nouveaux postulants. Tous ont entendu l’appel de Dieu et désirent y répondre, en faisant profession quand l’heure sera venue. Tous entendent l’appel de Dieu.

« Je suis chrétien, je suis appelé.  » Malheureusement on a comme spécialisé ce terme en parlant de vocation uniquement pour des personnes dont on dira : « elles ont la vocation ». Non, Sœurs et Frères, nous sommes tous des « appelés ». Des chrétiens de Corinthe Paul écrit qu’ils « sont appelés à être saints avec tous ceux qui, en tout lieu, invoquent le nom de notre Seigneur Jésus Christ, leur Seigneur et le nôtre. » et il ajoute : « Chacun doit rester dans l’état où il a été appelé. Toi qui étais esclave quand tu as été appelé, ne t’en inquiète pas ; même si tu as la possibilité de devenir libre, tire plutôt profit de ta situation. En effet, l’esclave qui a été appelé par le Seigneur est un affranchi du Seigneur ; de même, l’homme libre qui a été appelé est un esclave du Christ. Vous avez été achetés à grand prix, ne devenez pas esclaves des hommes. Frères, chacun doit rester devant Dieu dans l’état où il a été appelé. [3] »

L’appel de Dieu nous fait entendre à la fois ce que Dieu nous promet et ce que Dieu nous demande. « C’est uniquement pour répondre à l’appel de Jésus » que Thérèse est venue au carmel et, quelques années plus tard, « ce qui l’a attirée vers la Patrie des Cieux », en acceptant de mourir jeune, « c’est uniquement l’appel du Seigneur. [4] » A quoi le Seigneur nous appelle-t-il ? A la gloire. Oui, frères et sœurs, nous sommes tous appelés à la gloire. C’est la gloire du Ressuscité, de l’Agneau immolé et vainqueur du mal. Nous sommes ici pour avoir part à sa gloire. Cette participation à la gloire de Dieu, nous l’appelons la sainteté : laissons-nous encore enseigner par Thérèse, notre jeune Docteur de l’Eglise : « Je pensais que j’étais née pour la gloire, [j’étais] appelée à devenir une grande sainte » et, une fois entrée au carmel, « je compris ce qu’était la véritable gloire. [5] » C’est de cette gloire que nous parle Jésus. Il la nomme le « Royaume des cieux ». C’est une image qui nous rappelle le roi Salomon demandant un « cœur attentif, un cœur qui écoute ». Jésus nous enseigne le secret de cette gloire : il la compare au trésor caché, à la perle de grand prix. Dans la célébration de la messe ce trésor s’exprime dans un mot dont nous avons peut-être pris l’habitude. Ce mot c’est : Alleluia ! Oui, le secret dont nous parle Jésus dans l’évangile, le trésor d’où nous pouvons tirer du nouveau et de l’ancien, c’est la Joie pascale, la joie du Christ ressuscité. Si nous sommes vraiment chrétiens et catholiques, nous devons nous sentir plongés dans une joie toujours nouvelle et toujours vraie.

Chers Amis, vous qui avez fait retraite durant toute cette semaine dans notre centre spirituel, qu’avez-vous puisé en vous mettant à l’écoute de la Parole de Dieu ? N’est-ce pas la joie de l’évangile, comme nous y invite le pape François, ce grand ami de Thérèse. « La joie se trouve dans mon cœur… Je la possède sans retour. Elle me sourit chaque jour. Vraiment je suis par trop heureuse, je fais toujours ma volonté, Pourrais-je n’être pas joyeuse et ne pas montrer ma gaîté ? ». « Mon unique trésor, » « l’inestimable trésor qui se cache en mon âme, » « Jésus ma joie, c’est de t’aimer ! [6] »

Jésus, le trésor caché, la perle de grand prix : voulez-vous vraiment mettre Jésus au sommet de votre foi et de votre joie ? Voulons-nous répondre à son appel ? Voulons-nous aimer Jésus par-dessus tout ?

Fr. Philippe de Jésus, ocd - (couvent d’Avon)

[11 R 3,6

[21 R 3, 9

[31Co 1,2 et 7,20-24

[4Cf. Ms C 8v et LT 254

[5Ms A 32.71

[6PN 45 ; Pri 14,2 ; Pri 18,10

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