Ascension 2008, Mt28,16-20

« Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. »

« Après ces paroles, ils le virent s’élever et disparaître à leurs yeux dans une nuée. » Jésus a achevé son parcours sur terre au côté de ses apôtres et sa parole s’est, d’une certaine manière, éteinte sur terre, semble-t-il, lui-même disparaît, enlevé au ciel où il s’est assis à la droite de Dieu. L’allusion est évidente au psaume 109, que l’on dit le dimanche à vêpres, et qui rappelle la primauté du Christ grand prêtre. Jésus était donc bien le messie promis par tous les prophètes. Mais son départ pour le ciel signifie-t-il que tout est terminé ? Sommes-nous désormais les orphelins de Jésus ?

La parole de Jésus s’est donc, semble-t-il, tue ici-bas. Elle va néanmoins continuer plus que jamais, et même mieux que jamais, oserait-on dire, puisque les onze apôtres reçoivent la mission de Jésus d’aller dans le monde entier pour y proclamer la Bonne Nouvelle. La parole de Jésus qui, durant sa vie terrestre, était restée confinée à Jérusalem et en Galilée, n’ayant franchi que très exceptionnellement les frontières du pays, désormais, elle va se répandre dans tout l’empire romain. Et le livre des actes des apôtres, qui nous rapportent le travail des premières communautés chrétiennes, nous révèle que non seulement la parole de Dieu va atteindre le monde entier, mais elle ne perdra rien de son efficacité. Les apôtres Pierre et Paul, notamment, non seulement annoncent le message de Jésus, mais ils font des miracles aussi étonnants que ceux de Jésus : ils guérissent des aveugles, des boiteux, et même ressuscitent des morts ! « Qu’il ouvre votre cœur à sa lumière, pour vous faire comprendre l’espérance que donne son appel, la gloire sans prix de l’héritage que vous partagez avec les fidèles, et la puissance infinie qu’il déploie pour nous, les croyants. » La miséricorde et la puissance du Seigneur ne se sont pas éteintes pour les hommes parce que Jésus est désormais remonté auprès de son Père. Bien au contraire, plus que jamais, bien qu’absent, Jésus demeure à l’œuvre parmi ses disciples, ou plus précisément par ses disciples. Si les merveilles et les miracles de Dieu, continuent de se manifester aux hommes, c’est que les apôtres, et avec eux toute l’Eglise, sont les continuateurs de l’œuvre de Jésus. Et même mieux, l’église est le corps du Christ, et par elle, c’est le Christ qui continue son œuvre !

Il est vrai que Jésus a été enlevé corporellement à ses disciples, mais il n’en continue pas moins de parler et d’agir avec eux et par eux d’une manière toute nouvelle. C’est pourquoi l’évangile aujourd’hui nous dit : « Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde ». Même assis à la droite du Père, Jésus continue d’agir, il est au cœur de son Eglise. D’une certaine manière, il est beaucoup moins absent que l’on peut l’imaginer. N’avait-il pas laissé entendre à ses disciples qu’il valait mieux qu’il s’en aille ? Mais aussi n’avait-il pas dit qu’ils resteraient avec que jusqu’à la fin de temps, jusqu’à son retour en gloire ? Il faut donc comprendre le mystère de l’Ascension en tenant deux réalités qui nous semblent opposées. D’une part, il nous est profitable que Jésus soit remonté vers son Père, c’est-à-dire que d’une certaine manière, il nous soit enlevé. Et d’autre part, cette absence apparente cache une présence, s’il nous est enlevé physiquement, c’est pour nous être présent spirituellement de manière plus efficace.

Tout le récit des actes des apôtres tend à démontrer la véracité de cette double affirmation qui semble contradictoire. Et au début des actes des apôtres, le récit qui nous est fait de la première communauté chrétienne nous montre que les apôtres ne comprennent pas encore pleinement cette réalité de la présence spirituelle et agissante de Jésus dans son Eglise. Jusqu’au jour de la Pentecôte, les apôtres restent enfermés dans leur maison, ils ont encore peur. Il faudra que la promesse de Jésus se réalise, promesse de leur envoyer l’Esprit Saint. L’Esprit leur donnera alors non seulement de se souvenir de Jésus et de ses paroles pour pouvoir annoncer la Bonne Nouvelle aux hommes. Mais il sera dans leur cœur et dans leur vie la force et la puissance de Jésus. Il fera plus que combler le vide laissé par le départ de Jésus, il est celui qui fait de l’Eglise le corps du Christ, et donc il abolit spirituellement la distance créée par le départ physique de Jésus. Spirituellement, le départ de Jésus et la venue de l’esprit saint font que le Christ Jésus est aujourd’hui plus présent à son Eglise et à chacun de nous, car en Eglise, nous sommes le corps du Christ. « (Dieu le Père) lui a tout soumis et, le plaçant plus haut que tout, il a fait de lui la tête de l’Église qui est son corps, et l’Église est l’accomplissement total du Christ, lui que Dieu comble totalement de sa plénitude. »

Devenir chrétien, ce sera donc que pour nous tout d’abord croire que le Christ Jésus n’est pas absent de nos vies, qu’il peut réaliser en chacun de nous les merveilles que nous voyons réaliser dans les évangiles et dans les actes des apôtres. Nous n’avons pas la chance de vivre autant de Jésus, de pouvoir le toucher, mais cela ne signifie pas qu’il est absent de nos vies. Et comme les apôtres, pour pouvoir manifester cette force de Jésus, il faut nous préparer à recevoir l’Esprit Saint. Durant les jours qui nous séparent aujourd’hui de la Pentecôte, l’Eglise vit un temps de prière particulier où nous appelons la venue de l’Esprit Saint sur chacun de nous. Nous prierons particulièrement pour ceux qui vont être confirmés, mais nous devons croire que nous avons, nous aussi, reçu tous les dons de l’Esprit nécessaire à notre réussite spirituelle. Nous avons en nous tout ce qu’il faut pour accomplir notre vocation, car nous avons reçu l’Esprit Saint nous aussi. Le Seigneur est avec chacun de nous tous les jours jusqu’à la fin de temps, reprenons donc courage dans notre marche quotidienne.

Fr. Antoine-Marie Leduc, o.c.d.

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