Jeudi Saint 2013

En ce jeudi Saint, par lequel nous commençons les célébrations du Triduum Pascal, nous suivons Jésus dans trois temps forts où il exprime son profond amour de son Père et des hommes. En effet, Jésus pose trois gestes importants en ce jour, tout d’abord, il lave les pieds de ses disciples, puis il institue l’Eucharistie et enfin, il livrera le combat de l’agonie au jardin des oliviers. Et nous sommes invités ce soir à le suivre, à vivre avec lui ce jeudi Saint, en reposant les gestes qu’il a posés, en recevant son corps et son sang, en prenant le temps d’être à ses côtés durant son agonie.

Notre foi, qui n’est pas simplement une réflexion intellectuelle, a besoin de se nourrir et de poser des gestes qui nous engagent. Dans quelques instants, je laverai des pieds de quelques-uns d’entre vous pour vivre ensemble ce geste fort de Jésus envers ses disciples. Lui, le Maître et le Seigneur, sait prendre la condition d’esclave et s’abaisser devant ses amis. Il nous montre ainsi ce qu’est véritablement l’amour, lui qui a aimé les siens, il les a aimés jusqu’au bout. Et ce « jusqu’au bout » prend la forme de l’abaissement dans le lavement des pieds. Abaissement du fils de Dieu, qui s’est réalisé dans le mystère de l’incarnation, est une nouvelle fois manifesté dans ce travail d’esclave. Jésus nous montre ainsi ce qu’est l’amour véritable.

Le « jusqu’au bout » de son amour prendra aussi la forme du don total de lui-même sur la croix, don de soi qui est anticipé et symbolisé dans l’Eucharistie. En effet, la Sainte Cène anticipe la mort sur la croix, et dans l’Eucharistie, Jésus s’offre lui-même, il se donne à ses disciples. Au moment de sa mort, son corps, qui sera exposé sur la croix, ne sera ni perdu ni détruit. Par la résurrection, il sera régénéré en vie éternelle, et par l’Eucharistie, il devient pour tous les temps la nourriture de ses disciples. En se donnant ainsi jusqu’au bout, en nourriture, Jésus nous dit encore son amour pour nous, ils se donnent à tous, il se donne à chacun personnellement. Alors qu’aucun de nous n’a connu Jésus, quand il était sur terre, par le moyen de l’Eucharistie nous avons accès directement à lui, Jésus se fait notre nourriture, Jésus se fait présent à nos côtés pour nous soutenir sur notre chemin.

Enfin, au jardin des oliviers, il va choisir de nouveau et définitivement d’entrer dans sa Pâque et devenir ainsi l’agneau immolé pour le salut du monde. Il va choisir et engager tout son être, et ce choix n’a pas été facile pour lui. Par 3 fois, il a demandé que cette coupe s’éloigne de lui, et par 3 fois, il redit sa préférence d’amour pour l’œuvre du Père : « mais non pas ma volonté mais la tienne ! » Il y a là encore une formidable démonstration de l’amour qui s’offre, qui s’engage et qui s’oublie. Amour pour son Père qu’il veut servir jusqu’au bout, amour de tous ses frères en humanité pour qui il s’offre. Jésus le reconnaissait lui-même quand il disait qu’il n’y avait pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis.

Frères et sœurs, nous ne devons pas nous lasser de contempler, d’admirer et de rendre grâce pour le formidable amour de Jésus qui se manifeste par ces trois gestes du lavement des pieds, de l’Eucharistie et de l’agonie au jardin des oliviers. Jésus nous aime personnellement de tout son être, il s’est fait notre serviteur, il s’est fait notre nourriture et il s’est offert pleinement pour nous à son Père. Sans la foi, qui nous fait contempler comprendre cet amour, la passion de Jésus ne serait que l’anéantissement d’un homme, sa perte et son échec. Mais la profondeur de l’amour de Jésus qui motive chacun de ces actes en cette passion et qui habite son cœur à chaque instant, cet amour transfigure ce qu’il y a de douloureux dans le service, ce qu’il y a de déshumanisant dans la souffrance. Nous pouvons contempler paisible la passion de Jésus car nous y découvrons l’amour à l’œuvre, et non une mise à mort stérile.

En revivant cette année encore les événements du mystère pascal de Jésus, nous sommes invités à accueillir pour chacun de nous cet amour de Jésus qui se manifeste en ses paroles, en ses gestes, en sa passion. Ce que Jésus a vécu dans sa passion, il l’a vécu aussi pour moi. Jésus, mon Seigneur et mon Maître, me lave les pieds, Jésus, mon Seigneur et mon Dieu, se donne en nourriture pour me donner des forces sur le chemin de la foi, Jésus, Fils de Dieu, offre toute sa vie pour moi au jardin d’agonie. En accueillant personnellement les gestes et les paroles de Jésus, nous voulons renouveler notre alliance avec lui en ces Jours Saints. Certes nous mesurons toute la tragédie du mystère pascal, mais nous y lisons aussi et nous voulons accueillir tout le poids d’amour que Jésus y a mis. Comme disait l’Évangile, Jésus a aimé les siens et il les a aimés jusqu’au bout.

Que le seigneur nous trouve nous aussi sur ce chemin de l’amour, prêt à servir, prêt à se donner à Dieu et à nos frères. Contemplons cet amour, recevrons cet amour et tachons de le rayonner là où nous sommes.

Fr. Antoine-Marie, o.c.d.

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