Qu’est-ce-que la passivité ?

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I - Activité et passivité ; méditation et contemplation

Jean de la Croix décrit dans ses ouvrages les attitudes actives et passives de l’aventure spirituelle. Il distingue ainsi dans le chemin spirituel :

  • ce qui dépend de nous, avec la grâce de Dieu (part active qui consiste essentiellement à faire de la place à Dieu dans notre vie) : c’est ce que la tradition appelle l’ascèse (l’exercice spirituel qui nous rend disponible au don de Dieu)
  • ce qui dépend de Dieu (part passive où Dieu réalise mystérieusement en nous ce qui nous dépasse).
  • "L’âme pénètre de deux manières dans la nuit du sens : l’une active, l’autre passive. Elle y entre activement par des efforts personnels (méditation à la suite du Christ et efforts vertueux). Elle y entre passivement lorsqu’elle n’agit point et laisse Dieu agir en elle, se contentant de se comporter comme un sujet patient. " (MC 1, 1, 3)

Parler de passivité dans la vie spirituelle demande à être bien expliqué. Ce n’est pas une démission de la liberté ou encore de la paresse. Cela suppose au contraire un consentement difficile à laisser Dieu faire en nous ce qu’Il veut. Tout cela prend du temps et conduit à un changement de notre manière de prier, passant de la méditation (prière active qui s’appuie sur le raisonnement) à la contemplation (prière simplifiée et générale consistant à se tenir pauvrement devant Dieu qui se donne mystérieusement). Cela ne se provoque pas mais se reçoit comme une grâce.

Jean décrit avec finesse le passage de la méditation à la contemplation, en des terminologies complémentaires, de la voie de la vertu à celle de l’esprit, du sens à l’esprit, de l’activité à la passivité. Il donne trois critères pour aider à repérer ce changement et montre toutes les erreurs possibles. Il ne faut pas confondre l’expérience de la contemplation avec la tiédeur spirituelle ou une dépression psychologique.

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II - Qu’est-ce donc que la passivité ?

L’action de Dieu prédomine dans l’âme. C’est-à-dire que le croyant le laisse œuvrer en lui. Le méditant ou commençant doit donc apprendre à « se comporter passivement ». Jean d’ailleurs préfère l’adverbe " pasivamente « , qui est plus dynamique et responsable, au qualificatif » pasivo ", adjectif et substantif. Toutes les épreuves peuvent advenir, et certaines adviennent, mais le contemplatif vit une libération spirituelle.

Le Traité de La Nuit obscure est entièrement orienté vers cette nécessité pour celui qui progresse dans le chemin. En conclusion de la nuit passive du sensible (NO 1, 10, 6), Jean encourage : " Que cette âme ne se mette donc pas en peine de voir ses puissances divines privées de leurs opérations. Qu’elle s’en réjouisse au contraire, car si elle a soin de ne pas entraver l’œuvre de contemplation infuse que Dieu opère en elle, elle la recevra avec plus d’abondance et de paix, et donnera lieu à l’esprit d’amour de s’allumer et de s’embraser en elle. C’est en effet cette obscure et secrète contemplation qui le lui apporte et lui fait jeter des flammes. La contemplation, en effet, n’est autre chose qu’une infusion secrète, pacifique et amoureuse de Dieu en l’âme ; et cette infusion, lorsqu’elle ne rencontre pas d’obstacle, embrase l’âme de l’esprit d’amour « Et au long du livre 2 qui décrit la Nuit passive de l’esprit, Jean précise : »Comme c’est Dieu qui opère dans l’âme, elle est réduite à une totale impuissance. Elle ne peut ni prier vocalement, ni appliquer son attention aux choses divines, et moins encore aux choses profanes… « (NO 2, 8, 1) »Ici, c’est dans l’esprit qu’à lieu l’embrasement d’amour. L’âme, au milieu de ses ténèbres et de ses tourments, se sent vivement et fortement blessée d’un véhément amour, et en même temps elle a un certain sentiment de Dieu, elle entrevoit Dieu en quelque sorte, sans connaissances particulières… « (NO 2, 11, 1) »Toutes les opérations et tous les mouvements naturels entravent plus qu’ils ne favorisent la réception des biens spirituels de l’union d’amour, par la raison que tout l’habileté naturelle est incapable d’atteindre aux biens surnaturels que Dieu, par sa seule infusion, dépose dans notre âme passivement, secrètement et silencieusement… " (NO 2, 14, 1)

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