Glorifier son nom (Ho 5° dim. Pâques - 15/05/22)

donnée au couvent d’Avon

Textes liturgiques (année C) : Ac 14, 21b-27 ; Ps 144 (145) ; Ap 21, 1-5a ; Jn 13, 31-33a.34-35

La gloire, voilà un mot qui dilate le cœur et ouvre l’horizon ! Mais l’évangile emploie à cinq reprises, non pas le mot gloire, mais le verbe glorifier. Car la gloire n’est pas une réalité que l’on conquiert par soi-même sur les podiums des jeux olympiques ou sur le tapis rouge du festival de Cannes : elle se reçoit de Dieu à la manière de « la Ville sainte, la Jérusalem nouvelle, qui descend du ciel, d’auprès de Dieu, prête pour les noces, comme une épouse parée pour son mari. » (Ap 21,2) Avons-nous, frères et sœurs, le désir de cette gloire ? Jésus vient d’annoncer la trahison de Judas, et parle dans ce contexte de la gloire qu’il reçoit du Père et dont il glorifie le Père. La gloire de Dieu, c’est la manifestation de son amour dans le monde, un amour dont Jésus témoigne par le don qu’il fait de lui-même sur la Croix. Cette Croix, loin d’être un échec, révèle l’amour de Dieu et manifeste ainsi sa gloire.

Nous sommes nous aussi, frères et sœurs, appelés à glorifier Dieu en ouvrant notre cœur à l’amour qu’il nous témoigne en son Fils, mort pour nous afin que nous vivions de sa Vie. Et puisque la gloire de Dieu, c’est son amour, le glorifier ce sera obéir au commandement nouveau de l’amour : « Je vous donne un commandement nouveau : c’est de vous aimer les uns les autres. Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres. » Ce commandement n’est pas nouveau en raison de son contenu, car il existait déjà dans le judaïsme. Il est nouveau en ce qu’il trouve son fondement désormais dans le Christ : l’amour du Christ pour ses disciples est la source de l’amour qu’ils doivent avoir les uns pour les autres. Ce commandement est répété deux fois de sorte qu’il encadre ce qui en constitue le cœur, à savoir cet amour du Christ pour ses disciples : « comme je vous ai aimé !… » Ce « comme » a quelque chose de vertigineux. Comment est-il possible d’aimer comme Jésus ?

La réponse nous a été donnée par Jésus lui-même lorsqu’il a accompli le geste du lavement des pieds : « Si donc moi, le Seigneur et le Maître, je vous ai lavé les pieds, vous aussi, vous devez vous laver les pieds les uns aux autres. C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous. » (Jn 13,14s) Le Seigneur a posé un geste concret avant de nous livrer ce commandement nouveau, afin que la nature de cet amour soit bien comprise. Il ne s’agit pas de sentiments ou de mots tendres ; Jésus s’est montré rude et exigeant à l’égard de ses disciples. C’est un amour en acte qui le conduit à prendre humblement la place du serviteur. Ce service culmine sur la Croix où il dépose librement sa vie comme il le fit en déposant son vêtement pour laver les pieds de ses disciples. Aimer, c’est servir humblement, pour édifier la communauté fraternelle qui rend gloire à Dieu.

A propos de cet appel à aimer comme Jésus, Thérèse de l’Enfant Jésus s’est étonnée de ce que Jésus ait pu aimer ses disciples : « Comment Jésus a-t-il aimé ses disciples et pourquoi les a-t-il aimés ? Ah ! ce n’était pas leurs qualités naturelles qui pouvaient l’attirer. Il y avait entre eux et Lui une distance infinie. Il était la science, la Sagesse Eternelle. Ils étaient de pauvres pêcheurs, ignorants et remplis de pensées terrestres. Cependant Jésus les appelle ses amis, ses frères. Il veut les voir régner avec Lui dans le royaume de son Père. Pour leur ouvrir ce royaume, il veut mourir sur une croix, car Il a dit : Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. » (Ms C 12 r°) Thérèse décide alors d’aimer ses sœurs pour elles-mêmes, quelles que soient leurs qualités ou leurs défauts : « Ah ! je comprends maintenant que la charité parfaite consiste à supporter les défauts des autres, à ne point s’étonner de leurs faiblesses, à s’édifier des plus petits actes de vertus qu’on leur voit pratiquer … » (Ms C 12 r°)

Jésus lui-même n’a pas rêvé d’un monde idéal ; il nous aime tel que nous sommes pour nous révéler l’amour du Père. Aimer l’autre en vérité, c’est l’aimer tel qu’il est, sans en attendre de gratifications personnelles ; conscients nous-mêmes d’être gratuitement aimés de Dieu par-delà toutes nos misères, nous pouvons alors aimer notre prochain dans une attitude de disponibilité et de service pour le conduire à découvrir l’amour de Dieu pour lui. Puissent nos communautés chrétiennes vivre de cette humilité de Jésus pour donner au monde le goût du Royaume afin que Dieu soit glorifié pour son amour.

Fr. Olivier-Marie Rousseau, ocd - (couvent d’Avon)
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